En ce mardi 08 octobre 2019, une soixantaine de personnes ont répondu présentes pour la soirée organisée autour du documentaire d’Honorine Perino : « Le secret des champs » . Suite à sa projection, Gérard Boinon, paysan retraité, nous a fait part de son expérience et des enseignements qu’il en a tiré. Gérard Boinon est aujourd’hui consultant aux droits de l’homme de l’ONU* et membre de Rés’OGM info.
Un sol vivant pour une agriculture durable
Le documentaire « Secret des champs » explique bien la complexité du sol et l’impact de celui-ci sur les cultures. Ces connaissances permettent de mieux comprendre la limite que rencontre aujourd’hui l’exploitation agricole industrielle. En effet, cette agriculture « conventionnelle » épuise les sols et détruit la vie dans ceux-ci, une vie pourtant essentielle à la bonne santé des plantes qui y sont cultivées.
Les plantes ont un potentiel inouï. Loin d’être passives, elles sont capables de mettre en œuvre des stratégies efficaces pour se développer, se nourrir et se défendre. Serons-nous à la hauteur de leur potentiel ? Ce documentaire illustre sans chercher la polémique la manière dont les plantes cultivées s’associent, coopèrent, communiquent et cohabitent avec les êtres vivants qui les entourent : les insectes, les champignons du sol et les autres plantes.
Les recherches scientifiques et paysannes récentes ouvrent des pistes d’innovation pour l’agriculture, éclairées notamment par l’expérience de Marc Dufumier, agronome émérite. Du maraîchage à l’agroforesterie, en bio comme en agriculture de conservation, ce sont finalement les pratiques des paysans qui permettent d’activer le potentiel du vivant pour l’agriculture.
Gérard Boinon, un homme victime des produits phytosanitaires qui a su remettre intégralement en question ses pratiques
À l’issue de la projection du film, un échange s’organise au cours duquel il confiera à la salle : « Il s’est passé quelque chose avant, en fait. En 1984, j’ai été empoisonné par un pesticide en traitant les pucerons du blé sur mon exploitation. J’ai eu une urticaire géante. J’ai eu la vie sauve, car je me suis rendu à l’hôpital avec les bidons qui m’avaient empoisonné. Depuis cette date, je suis impuissant. Je suis resté 25 ans sans le dire. Depuis 2008, j’ai décidé de le dire, car les paysans sont les premières victimes des pesticides. »
Et de poursuivre : « J’ai essayé de convertir mon exploitation à une agriculture plus propre. Cela a pris un certain temps, car je ne savais pas faire sans produit chimique. J’avais suivi un cursus d’exploitant agricole. Il faut retrouver un savoir-faire… Cela a demandé un certain nombre d’années. »
En conclusion
On retiendra de ce mardi alternatif la nuance entre paysan et exploitant agricole – aujourd’hui, c’est de paysans dont nous avons besoin. Oui, il est difficile pour des exploitants formés dans une agriculture conventionnelle de changer de pratique, de s’affranchir du poids des traditions familiales d’après guerre pour apprendre de nouvelle techniques nécessaires. Mais ce n’est pas impossible. Gérard Boinon nous a ainsi glissé voir émerger une prise de conscience dans le milieu agricole sur la nécessité de voir émerger un autre modèle agricole, pour la santé des agriculteurs, des habitants et du vivant dans son ensemble (vivant dont l’homme est totalement dépendant).
* Il nous apprendra d’ailleurs au cours de cette soirée qu’une « Déclaration sur les droits des paysans » a été adoptée à l’ONU en décembre 2018 – un nouvel outil potentiellement très puissant pour défendre l’agriculture paysanne.